Artiste Victor Brauner
Œuvre Loup-table
Date de création 1947
Dimension 54 x 57 x 28,5 cm
Média Assemblage de matériaux divers (bois et renard naturalisé)
   
Principales caractéristiques

L’assemblage d’objets est un procédé qui fait ressortir l’humour de l’œuvre d’art ce qui est une des principales caractéristiques de la technique surréaliste. L’absurdité de ce collage réside dans l’humour de l’association même entre la table inerte et ce loup dénaturé. Cet objet irréel semble exister parce qu’il est matériel ; avoir un sens, une spécification et une vitalité. Cette table naturalisée est cependant profondément inutile dans sa fonction d’objet. Cette inutilité lui sert par contre à faire ressortir la mesquinerie sociale des choses, à se libérer de la réalité. L’humour est un moyen de percevoir le monde sous un autre angle, en modifiant nos relations aux objets usuels. Loup-Table questionne et déstabilise nos connaissances familières de l’objet. La structure de l’œuvre est elle aussi déstabilisée par le jeu de la patte arrière subtilement déplacée. Cette fantaisie créatrice bien calculée permet d’adoucir l’association. Ainsi il serait difficile de dire si la table est d’inspiration primitive ou si l’œuvre est une matérialisation de l’animal. Les objets surréalistes sont tous détournés de leur usage habituel. La définition des objets surréalistes est la suivante : Objet qui se prête à un minimum de fonctionnement mécanique et qui est basé sur les phantasmes et représentations susceptibles d’être provoqués par la réalisation d’actes inconscients. Loup-Table est une œuvre poétique qui semble sortir d’un conte d’enfant. De tels objets nous font croire en l’irréel. Riez naïvement de cette œuvre semble vouloir dire Brauner. D’un autre point de vue, la bête, par son expressivité semble vouloir nous effrayer. La véritable volonté automatique des surréalistes nous éloigne cependant de toute recherche de référence analogique, et nous renvoie à l’essence première de notre subconscient.

Contexte sociohistorique Artiste roumain, né a Piatra-Neamt en 1903, Victor Brauner fut initié au spiritualisme dès son jeune âge par son père qui l’envoya étudier à l’école évangélique de Braïla de 1916 à 1918. Il connaît l’avant-garde de sa Roumanie natale, et s’associe au dadaïsme avant d’emménager à Paris en 1929, où il rencontra des figures marquantes telles que Giacometti, Breton, Brancusi, Tanguy. L’année 1932 marqua son adhésion officielle au sein du groupe surréaliste. Ayant connu l’horreur et l’irrationalité de la Première Guerre Mondial, Brauner, comme d’autres artistes et penseurs, remit en question la valeur de la pensée scientifique, soit disant source d’évolution et de confort pour l’homme. Pour fuir cette vague destructrice, le rêve et l’imaginaire devinrent le lieu de création et d’évasion de Brauner. Certaines de ses œuvres comportent des références religieuses énigmatiques. Ses paysages, empreints de religion et de mystification, semblent s’inspirer de l’artiste de Chirico et de la Pittura metafiscia italienne.
Incidences Brauner fut pour le mouvement surréaliste un grand inventeur de forme. Le surréalisme eut une grande influence sur la pensée décoratrice qui suivit. Des œuvres comme Loup-Table ne peuvent que questionner l’esprit créateur du designer et laisser place à une nouvelle créativité dans la fabrication de meubles contemporains. On peut donc croire que Brauner comme d’autres concepteurs d’objets surréalistes ont marqué l’œuvre d’une nouvelle génération d’artistes tels que Antoni Tapies, Robert Fillion et Günther Uecker qui s’emparèrent de la matérialité de la chaise et la modifièrent, laissant libre court à la forme et à leur imagination. Ces derniers comme les surréalistes et les dadaïstes oublièrent la conception d’utilité de l’objet quotidien et de cette manière, remirent en question la notion d’œuvre d’art en poussant les limites qui séparent l’objet de la sculpture.
Bibliographie VIRMAUX, Alain et Odette, Les grandes figures du surréalisme, Les Compacts, Paris, Bordas, 1994, 255 p.

Histoire de l’art
(peinture ,sculptur e,architecture), Hachette éducation, Paris, 1995, 319 p.

BRETON, André, Manifeste du surréalisme, Idées, 23, Gallimard, Extraits des Éditions Jean-Jacques Pauvert, Dépôt légal 1963, 1983, 188 p.

FAUCHEREAU, Serge, Surréalisme, Découvrons l’art, Paris, Cercle d’art, 2002, 63 p.

La révolution surréaliste, Centre Pompidou, Paris, Gallimard, 2002, 447 p.

LAGEIRA, Jacinto, Centre Pompidou (Musée national d’art moderne) peintures et sculptures, Centre Pompidou, Paris, Editions Scala, 2000, 2001, 141 p.
Commentaire
Julie Lessard
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