Artiste Bill Traylor
Œuvre Dogfight With Writing
Date de création 1939-1942
Dimension 21” x 22”
Média Peinture pour affiches et crayon de bois sur du carton
   
Principales caractéristiques

Sur la peinture on voit deux chiens en train de se battre. Graphiquement, cette œuvre est très intéressante ; les deux animaux ressemblent à des taches noires. Ils ne se touchent pas, et les positions qu’ils prennent font penser à deux humains en train de discuter. Malgré l’agressivité des formes et du contraste, les dents menaçantes des chiens, les yeux grand ouverts, la simplicité avec laquelle l’œuvre a été exécutée rappellent plus quelque chose d’enfantin, d’amusant même. Surtout l’écriture en bas de la page, qui fait aussi partie de la composition, laisse penser à la façon des enfants de signer leurs œuvres et de marquer leur âge à côté. Dans ce cas, «…Ce dessin a été fait par Bill Traylor, vieil homme. 85 ans ». C’est drôle comment il s’amuse avec l’écriture en déformant les lettres de son nom.

Situation dans l’œuvre de l’artiste La collection des œuvres de Bill Traylor, comporte beaucoup de dessins avec des animaux. Ce sont toutes des œuvres graphiques, que l’on pourrait classer dans la catégorie « art primitif africain».

L’humour est omniprésent dans l’ensemble de son travail. Parfois c’est l’histoire qui est amusante, ou le jeu des formes et de l’espace, ou encore c’est la surprise d’un événement abstrait, d’un geste corporel précis. 1

Ce qui est aussi particulier à cet artiste, c’est que l’évolution de son travail se faisait en fonction du matériel disponible à ce moment. Les premiers temps, il utilisait uniquement le crayon de bois. Il dessinait des objets placés en ligne, puis une série d’ «événements excitants » est apparue (des gens et des animaux qui courent partout et crient, batailles, personnes poursuivies par un serpent, etc.) Lorsqu’il a reçu ses couleurs, il a commencé une période abstraite. Dans plusieurs de ses dernières oeuvres, il faisait des combinaisons entre des formes abstraites et des animaux, des gens dans des états différents, des enfants diaboliques…
Situation dans son contexte Bill Traylor était né esclave à la plantation Traylor à Benton, Alabama et il a appris à dessiner par lui-même. Son ami Shannon l’encourageait et lui fournissait du matériel. Malheureusement, son art n’a vraiment été apprécié et célébré qu’après sa mort, quoique l’artiste ne tenait pas absolument à être reconnu.

Il y a presque toujours une histoire qui se rattache aux images de Bill Traylor. Ses commentaires sont tout le temps précis, souvent amusants, mais toujours touchants, étant représentatifs de la vie. Ayant vingt enfants habitant un peu partout, ayant connu la pauvreté, l’alcool, les problèmes sociaux tels que le racisme, Bill Traylor n’avait pas une vie stable. L’état parfois chaotique de ses personnages reflète le genre d’existence que l’artiste menait.

Le spectateur doit être sensible aux deux aspects, visuels et narratifs pour être capable d’apprécier son travail. « Ça a l’air que son travail a dépassé l’étiquette de l’art « noir » ou « traditionnel » et s’est fait une place à lui tout seul. » 2
Incidences Je trouve que Bill Traylor présente beaucoup d’intérêt en tant qu’artiste, et ce n’est pas par hasard que son travail suscite autant de curiosité. Ses œuvres reflètent sa personnalité originale, et son approche est tout à fait non prétentieuse. Au XXe siècle les artistes ont beaucoup expérimenté avec des matériaux différents, utilisant à la limite n’importe quel matériau. Les limites de ce qui peut être appelé « art » se sont ainsi élargies. L’art pauvre fait son apparition, les peintures et sculptures du Tiers Monde provoquent de plus en plus l’intérêt du public, l’estampe inuit voit le jour suite au voyage de James Houston aux Territoires du Nord-Ouest. Et parmi ces personnes, plusieurs sont devenus artistes sans aucune préparation.
Les normes d’enseignement ont aussi beaucoup changé, tandis que là nous avons affaire à un pur autodidacte, ce qui fait son style absolument unique et puissant à sa façon. Surtout de nos jours, quand l’art est souvent utilisé comme moyen de guérison et exploration de soi, les barèmes et les façons de faire sont à désapprendre.

Et nous nous posons la question :

Est-ce vraiment nécessaire d’étudier les arts et d’apprendre de quelqu’un d’autre?

Et vu que Traylor a commencé sa carrière d’artiste a 85 ans, ça remet encore plus en question les limites que l’on se crée au départ.
 

1 Voir l’entrevue avec son ami Shannon: Frank Maresca/Roger Ricco, Bill Traylor: His Art – His Life, New York, Alfred A. Knopf, Inc. 1991, 194 p. (Première edition)

2 Idem. Cité de la p.31

Bibliographie Frank Maresca/Roger Ricco, Bill Traylor: His Art – His Life, New York, Alfred A. Knopf, Inc. 1991, 194 p. (Première edition)

D’autres informations proviennent des sites Internet sur Bill Traylor, l’estampe inuit, recherches en art précédentes, lettres de mon amie qui m’a fait connaître Bill Traylor.
Commentaire
Margarita Fert
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