Artiste Salvador Dali
Œuvre

Métamorphose de Narcisse

Date de création

1936-1937

Dimension

50,8 x 78,3 cm

Média

Huile sur toile

 

 

Principales caractéristiques

À première vue, l’œuvre met en relation deux éléments principaux dans cette peinture dont l’homme et la main tenant l’œuf. Ces deux figures sont indissociables, car elles ont la même forme, le même contour et la même grandeur. En plissant les yeux, on peut observer que ces deux formes s’associent pour n’en devenir qu’une. Le personnage principal nu est assis dans l’eau, la tête munie d’une queue de cheval. Il est appuyé sur le genou, regardant son nombril ou son sexe ou tout simplement en train de réfléchir. La seconde figure qui est la main, donne l’impression qu’elle est une grosse pierre tenant un œuf d’où sort une fleur. «Les fameuses fourmis de Dali font leur apparition dans cette toile comme dans d’autres de ces tableaux» 1. Il s’agit d’un symbole récurrent comme l’horloge molle provenant du tableau La persistance de la mémoire, sa femme Gala,… Cette peinture est en fait un paysage regroupant plusieurs choses dont les deux figures principales, des personnages nus au loin, une plaquette ressemblant drôlement à un jeu d’échecs, une statue posée sur celle-ci, un chien cadavérique, une ombre de personnage ou d’une chose particulière… Le ciel du paysage est partiellement nuageux, donc le soleil apporte une très grande luminosité aux figures. Cette toile munie de couleurs chaudes évoque la chaleur, l’agressivité. La puissance des couleurs de ce tableau accentue l’intensité de la lumière et de l’esthétique proposée par Dali. On peut observer une très belle réflexion de l’image du personnage et du paysage sur l’eau à la gauche du tableau. Les deux principaux éléments du tableau ont l’air figés, stables et amènent une lourdeur à la présentation. Ce paysage demeure mystérieux et d’un calme douteux. «On a l’impression que quelque chose va surgir …» 2 L’application de la peinture est en aplat, car on ne peut pas observer l’empâtement et la texture de la peinture. De plus, en ne voyant pas le visage du personnage, on ne peut pas voir son expression faciale. Dans un autre ordre d’idée, la profondeur s’observe par le rapetissement des formes en s’éloignant du premier-plan du tableau. Le mystère, le rêve et l’«au-delà du visible» s’avèrent présents, donc c’est là qu’on voit que cette toile fait bel et bien partie du surréalisme et non d’un autre courant artistique. En tant que spectateur, on baigne dans un monde inexplicable, inconscient, de rêveur.

 

Situation dans l’œuvre de l’artiste

Il s’agit d’une des œuvres les plus marquantes de l’œuvre de Dali. Ce n’était pas sa première toile, car on peut observer l’habileté à la représentation des éléments. À ses débuts, Dali a eu de la difficulté à faire sa place au sein des surréalistes, mais cette toile en a fait parler plus d’un. Ses premiers tableaux avaient plutôt une inspiration réaliste, impressionniste et cubiste. Alors, cette toile et quelques autres ont facilité son intégration au courant artistique surréaliste. Métamorphose de Narcisse est le premier tableau obtenu entièrement d’après l’application intégrale de la méthode paranoïaque-critique.  Selon Dali, la paranoïa fonctionnait comme une hallucination susceptible d’activité créatrice logique. La méthode pouvait être utilisée pour l’apparition d’images doubles ou d’un « délire raisonnant » des surréalistes 3.Dali a eu la chance de pouvoir montrer cette œuvre à un penseur célèbre et controversé. «C’est ce tableau que Dali montra au docteur Freud, lors de leur unique rencontre, à Londres en juillet 1938.» 4 Dali a non seulement réalisé cette toile, mais il a écrit également un poème expliquant sa toile. Freud a bien aimé voir et observer le travail de l’artiste surréaliste. Pour réaliser cette œuvre, Dali s’est inspiré de la mythologie grecque. «Narcisse était un beau jeune homme qui tomba amoureux de son propre reflet dans l'eau d'une cascade; il se noya, s'étant jeté dans l'eau pour embrasser son image. Son corps ne fut pas retrouvé, mais à la place, on trouva une fleur qui porta son nom. Ici, le jeune homme est montré avant et après la métamorphose en une main tenant un oeuf craquelé d'où pousse la fleur narcisse.» 5 Finalement, ce passage fait la psychanalyse du travail, mais Dali ne s’est pas limité à montrer seulement cette mythologie. Son univers est unique. On ressent dans cette œuvre, une perturbation, une douleur, un questionnement qui proviennent sans aucun doute de la situation de l’artiste au moment de la réalisation.

 

Situation de l’œuvre dans son contexte

Un des plus grands maîtres du surréalisme est sans aucun doute le célèbre Dali. Cependant, il n’a pas été le précurseur de ce courant. Max Ernst, Magritte furent des personnages aussi importants dans l’histoire du surréalisme. Chacun avait son style propre. Les peintures du peintre sont généralement léchées et associées au trompe-l’œil. L’arrivée du surréalisme apporta une toute nouvelle vision de l’art. Peindre de façon surréaliste n’avait pas une seule option déterminante. Certains déconstruisaient la réalité visible pour ainsi inventer un nouvel espace surpassant notre regard. D’autres s’attardaient plus à l’interaction des symboles n’ayant plus leur signification première en pensant principalement à Magritte. Les surréalistes ont un très grand pouvoir sur leur perception des choses, ils sont comme des dieux qui inventent leur propre univers. Donc, ce courant apporte une grande place au rêve, à l’imagination, à l’inconscient.  Une grande liberté a pris place dans le surréalisme, car les refoulements de l’inconscient, de notre esprit sont dévoilés. Tout être imagine et rêve parfois à des choses qui ont l’air plus vraies que la réalité.

 

Conclusion

Par sa qualité exceptionnelle, Dali a su produire une œuvre digne de son talent de représentation et d’imagination. Il restera sans aucun doute un modèle d’inspiration pour de nombreux étudiants. Cet artiste excentrique a su se démarquer de ses confrères surréalistes et il n’avait pas à envier ses concurrents. Certaines de ses œuvres peuvent être très intimes. Elles dévoilent parfois ses peurs (les fourmis), sa muse (Gala, sa femme), sa fascination pour la malléabilité. Ses premières influences surréalistes proviennent de son enfance : « Il s’imaginait chuter dans les airs, dans le vide en ayant l’attention et les regard des autres élèves. Le jeune Dali imaginait des situations étranges pour faire fuir le fantôme de son frère mort qui portait le même nom que lui. » 6 De nos jours, ses oeuvres sont régulièrement citées et reprises que ce soit en publicité ou à la télévision comme dans la série Les Simpsons.La fascination du public pour ses œuvres est évidemment reliée à la recherche esthétique de l’artiste et à son immense talent de peintre.

 

 

1 Voir Métamorphose de Narcisse, REY, Henri-François, Dali dans son labyrinthe, Grasset et Fasquelle, Paris, 1974, p.205.

2 Voir analyse de l’œuvre, NÉRET, Gilles, Dali, Taschen, Paris, 1994, p.76.

3 Voir paronoïaque-critique, CHARLES, Victoria, Salvador Dali, Parstone press, Angleterre, 1999, p.117.

4 Voir Métamorphose de Narcisse, POMPIDOU, Georges, Salvador Dali, Éditions de la Table Ronde, Paris, 1980, p.215.

5 http://perso.wanadoo.fr/henri.dubuc/PAGES/LivreArt/Dali/Narcis.html

6 Voir enfance de Dali, REY, Henri-François, Dali dans son labyrinthe, Grasset et Fasquelle, Paris, 1974, p.35.

 

Bibliographie

CHARLES, Victoria, Salvador Dali, Parstone press, Angleterre, 1999, 237 pages.

DESCHARNES, Robert, l’œuvre et l’homme Dali, Trois continents, Suisse, 1984, 453 pages.

HUGHES, Robert, Les essentiels de l’art Dali, Ludion, Belgique 2003, 431 pages.

NÉRET, Gilles, Dali, Taschen, Paris, 1994, 96 pages.

POMPIDOU, Georges, Salvador Dali, Éditions de la Table Ronde, Paris, 1980, 414 pages.

REY, Henri-François, Dali dans son labyrinthe, Grasset et Fasquelle, Paris, 1974, 240 pages.

http://perso.wanadoo.fr/henri.dubuc/PAGES/LivreArt/Dali/Narcis.html

 

Commentaire

Simon Côté-Desjardins

 

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