Artiste Tamara de Lempicka
Œuvre Autoportrait
Date de création vers 1932
Dimension 35 x 26 cm
Média Huile sur panneau
 

 

Principales caractéristiques

Dans son autoportrait, Autoportrait, traite les volumes de façon sculpturale. Il n’y a pas de différence de textures entre la femme et la voiture, même la boucle blonde dépassant du casque est stylisée, on ne représente pas la multitude des cheveux mais bien une masse lisse et définie. Le rendu de l’écharpe rappelle sans contredit le cubisme, qui a révolutionné la peinture une vingtaine d’année avant cet autoportrait. Quant à la présence de la voiture, elle nous indique qu’à l’instar des avant-gardistes, la notion de progrès et de vitesse est au cœur des préoccupations de l’artiste. Pourtant, malgré son thème résolument moderne, le tableau emprunte au classicisme ses règles d’élégance et sa facture léchée.

 

Situation dans l’œuvre de l’artiste

Autour de 1920, Tamara de Lempicka prend des cours à l’Académie de la Grande Chaumière. André Lhote, son professeur, lui enseigne un art figuratif nommé cubisme synthétique. Il veut « établir un art réaliste sensiblement accessible au public et volontairement appuyé par la classe dominante. »1 Elle commence donc à peindre en exagérant la forme des objets et des êtres en un maniérisme voluptueux. Également grâce à André Lhote, elle découvre Ingres et s’inspire de ses nombreux nus féminins « comme on peut remarquer d’après la similarité stylistique, entre Bain turc de 1862 d’Ingres et The Bathers de 1929 environ ».2 Outre le style, elle retiendra surtout l’érotisme ambigu d’Ingres qu’elle modernisera dans ses nombreuses compositions représentant deux « amies » nues ou habillées.  

Vers 1926 Tamara de Lempicka commence à présenter ses portraits dans des expositions consacrées à l’Art Déco, vend plusieurs toiles et devient un membre important des milieux mondains européens de l’entre-deux-guerres. L’autoportrait qui nous intéresse a d’ailleurs été commandé pour faire la couverture d’un magazine de mode allemand, Die Dame. Son style est alors complètement maîtrisé. Elle a trouvé l’équilibre parfait entre le cubisme et le classicisme, deux mouvements pourtant antagonistes.

 

Situation dans le contexte socio-historique et intellectuel

Les artistes avant-gardistes du tout début du XXe siècle ont quitté le domaine de la représentation exacte du réel, en fragmentant la surface de la toile, pour finalement aboutir à l’art abstrait. Au lendemain de la première guerre mondiale, certains artistes retournent vers la figuration. « L’horreur destructrice de la guerre a causé chez quelques artistes une réaction conservatrice face aux arts. »3  Ils en reviennent au portrait et aux règles de la renaissance. Paradoxalement, l’Art Déco de Tamara de Lempicka est également représentatif de la décadence et de l’insouciance des années folles.

Tamara de Lempicka représente la modernité par son image de la femme et de sa sensualité qui indique l’avènement du féminisme. Dans ses nombreux portraits et autoportraits, elle peint une femme indépendante, active, sûre d’elle-même et maîtresse de son destin. Son Portrait de la duchesse de la Salle en 1925 met en scène une femme moderne, en veste et en pantalon d’équitation, prenant une pose masculine. Sur son Autoportrait de 1932, elle fixe avec défi le spectateur, froide et sensuelle, en contradiction avec la passivité et la langueur des nus exotiques générés par une peinture phallocentrique.  Sans oublier que l’automobile représente des valeurs jusqu’alors masculines : la vitesse et la liberté.

 

Conclusion

En 1939, Tamara de Lempicka déménage aux États-Unis afin de fuir la guerre. Elle sombre peu à peu dans l’oubli et ses quelques expositions en terre américaine, où elle tente de moderniser son style en tâtant du surréalisme et de l’art abstrait, sont un échec. Elle est oubliée par l’histoire puis redécouverte grâce à une exposition rétrospective Les années 25 en 1966 au Musé des arts décoratifs. Suite à cette exposition son œuvre d’entre-deux-guerres  suscite un certain engouement, mais elle « n'est sans doute pas une artiste majeure du XXe siècle : sa production pléthorique et par trop homogène manque de chefs d'œuvre ».4 Elle demeure surtout le témoin d’une époque, les années folles qui ont reconnu en elle l’image de la femme moderne.

 

 

1 Julie Lapostole, Sens et fondement de l’ambiguïté dans quelques œuvres de Tamara de Lempicka, Montréal, mémoire de maîtrise en art  (UQAM), 2003

2 Tamara de Lempicka : symbole d’élégance et de transgression, Montréal, Musée des beaux-arts de Montréal, 1994, page 9

3 Julie Lapostole, Sens et fondement de l’ambiguïté dans quelques œuvres de Tamara de Lempicka, Montréal, mémoire de maîtrise en art  (UQAM), 2003

4 Fabrice Philibert-Caillat, http://fr.wikipedia.org/wiki/Tamara_de_Lempicka

 

Bibliographie

Calvesi, Maurizio, Tamara de Lempicka : symbole d’élégance et de transgression, Musée des beaux-arts de Montréal, Montréal, 1994, 110p.

Blondel, Alain, 1999, Tamara de Lempicka, catalogue raisonné 1921-1979, Paris, Éditions Acatos, 527p.

Néret, Gilles, Tamara de Lempicka, Benedickt Taschen, Allemagne, 1993, 79p.

Lucie-Smith, Edward, La peinture art déco, Phaidon, Oxford, 1990, 160p.

Néret, Gilles, L'art des années 20 : peinture, sculpture, architecture, desing, décors, graphisme, photographie, cinéma, Édition du Seuil-Fribourg, Paris, Office du livre, 1986, 248p.

Philibert-Caillat, Fabrice, http://fr.wikipedia.org/wiki/Tamara_de_Lempicka, WiKipédia Libre savoir (consulté le 10 octobre 2005)

 

Commentaire

Marianne Pon-Layus

 

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