Artiste Paul Klee
Œuvre Le poisson rouge
Date de création 1925
Dimension 48,5 x 68,5 cm
Média Huile et aquarelle sur papier monté sur carton
   
Principales caractéristiques

Cette œuvre réalisée en 1925 montre huit poissons tous de tailles diverses et aux couleurs éclatantes, sur un fond noir où des fragments de vagues et d’algues sont gravés dans l’huile fraîchement appliquée. L’un des poissons occupe le centre de la toile et est dominant par sa taille beaucoup plus large que celle des autres poissons. Ébauchée de façon naïve et primitive cette toile rappelle l’art des enfants par sa mise en page et la simplicité des formes qui l’occupent. L’on y sent toutefois une narration légendaire, comme si l’image devenait ici mythique. Klee fut en 1912 le premier peintre moderne à accorder une importance créatrice à l’art des malades mentaux. Il met en parallèle leurs œuvres avec celles des enfants. « Les enfants ne sont pas moins doués, et il y a une sagesse à la source de leurs dons ! Moins ils ont de savoir-faire, et plus instructifs sont les exemples qu’ils nous offrent et il convient de les préserver très tôt de toute corruption. Des phénomènes parallèles se retrouvent chez les aliénés 1 ».

Situation dans l’œuvre de l’artiste Paul Klee est né en 1879 près de Berne dans une famille de musiciens. Violoniste dès son jeune âge, ce n’est qu’en 1898 qu’il entreprit des études en peinture. Presque la totalité de son œuvre peut être dite «musicale». C’est en 1914 lors d’un voyage en Tunisie, en compagnie des peintres Moiliet et Macke, qu’il prend conscience de la révélation de la couleur et du fait qu’il est peintre. Ce voyage marque un tournant essentiel dans l’évolution de son art. Désormais, pour lui la forme et le dessin n’ont plus autant d’importance que la couleur. Klee note dans son journal : « La couleur me possède. Point n’est besoin de chercher à la saisir. Elle me possède, je le sais. Voilà le sens du moment heureux : la couleur et moi sommes un. Je suis peintre. 2 » En 1920 il est nommé professeur au Bauhaus, fondé à Weimar par Walter Gropius, qui est transféré en 1925 à Dessau. Klee participe la même année à la première exposition surréaliste à Paris. C’est dans ce contexte que Le poisson rouge fut réalisé en 1925. On peut donc, en tenant compte de sa vision face à l’art, inclure son œuvre dans le courant de peinture allemande de notre siècle, l’expressionnisme. Il faut également souligner l’admiration qu’il éprouvait pour les manifestations plastiques spontanées des enfants et des peuples primitifs dans lesquels la ligne évoque le rêve. Entre le cubisme, le néo-impressionnisme, l’art des malades mentaux, des enfants et la musique, l’œuvre de Klee est exceptionnellement variée.
Situation dans son contexte Paul Klee est une figure isolée dont l’œuvre est difficilement comparable à celle de ses contemporains. Bien que l’isolement et la singularité de son travail artistique le mettent en marge des autres artistes de son temps, il fréquentait tout de même de nombreuses figures reconnues. Comptent parmi ses relations amicales Robert Delaunay, August Make, Franz Marc, Wassily Kandisky, Georges Braque et Pablo Picasso pour lesquels il éprouvait une profonde estime. Mais contrairement à certains de ces artistes, Klee n’a pas soumis les arts plastiques à des méditations rationalistes. On peut situer l’art de Paul Klee dans le courant de l’expressionnisme allemand, où la couleur passe avant la structure. Surtout au cours des cinq années qui précédèrent la Première Guerre Mondiale, et jusqu’à l’avènement du nazisme. Enseignant à la célèbre école du Bauhaus dès 1920, il contribua à l’évolution des arts plastiques et mènera une formidable carrière pédagogique. L’œuvre de Klee se développe au moment où l’on commence à connaître les recherches de Sigmund Freud sur la psychanalyse. D’ailleurs, il accordait une grande importance au fait que l’artiste se doit d’exprimer et de sonder l’invisible.
Incidences L’œuvre de Paul Klee a joué un rôle de première importance dans la révolution de l’art moderne. Son art est à la fois abstrait et représentatif, profond et subtil. Sur le plan spirituel, l’on sent qu’il rattache à son œuvre le sens du sacré. Il meurt le 29 juin 1940. Sa pierre tombale porte en épitaphe cet extrait de son journal :« Je suis insaisissable dans l’immanence. Car je réside aussi bien chez les morts que chez les êtres qui ne sont pas encore nés. Un peu plus proche du cœur de la création qu’il n’est habituel. Et cependant, pas autant que je le souhaiterais. 3 » Les écrits de Klee sont d’irremplaçables références, telle la Théorie de l’art moderne réédité en 1985, La pensée créatrice en 1973 et Histoire naturelle infinie en 1977. Son apport à l’art moderne demeure ressenti encore de nos jours. Il compte à son actif une production de neuf mille dessins et peintures dont la diversité extrême lui donne un exceptionnel rayonnement.
 

1 Jean-Louis Ferrier. Paul Klee, Paris, Terrail, 1998, p.196.

2 Daniel Abadie. Paul Klee, Préface de J-L. Prat, Paris, Maeght, 1977, p.10.

3 Jean-Louis Ferrier. Paul Klee, Paris, Terrail, 1998, p.196.

Bibliographie ABADIE, Daniel. Paul Klee, Préface de J.-L. Prat, Paris, Maeght, 1977, 177p.

FERRIER, Jean-Louis. Paul Klee, Paris, Terrail, 1998, 207p.

JARDI, Enric. Paul Klee, Traduction de R. Marrast, Paris, Albin Michel, 1990, 128p.

Commentaire
Isabelle Caron
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