Artiste | Paul KLEE |
Œuvre | Jardins tunisiens (du sud) |
Date de création | 1919 |
Dimension | 24 x 19 cm |
Média | Aquarelle |
Principales caractéristiques | Ce tableau est une aquarelle. Il est composé de carrés et de rectangles de dimensions différentes, avec des contrastes de couleurs très forts. En haut, des triangles donnent l’impression de toits ou de tours. En deux endroits, l’artiste a placé des arbres en ajoutant des branches aux rectangles foncés. Les contrastes de cette peinture sont très intéressants, les couleurs sont éclatantes, ce qui provoque un sentiment de joie, d’euphorie. Les formes n’ont pas de contour, elles entrent en contact les unes avec les autres très doucement, créant ainsi une harmonie. Ici, ce n’est pas vraiment la nature, mais l’agencement des couleurs qui avait inspiré le peintre. Les couleurs sont lumineuses : beaucoup de rouge, de jaune, d’orange, ainsi que de bleu clair. Il s’y mêle quelques taches noires, dont certaines sont placées en diagonale, ce qui souligne encore plus la luminosité des couleurs. C’est une œuvre très joyeuse, qui fait penser à une journée pleine de soleil.
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Situation dans l’œuvre de l’artiste | Étant dans sa vingtaine et fasciné par le monde végétal, Klee a été découragé de ne pouvoir peindre que ses perceptions sensorielles des plantes 1. Il les regardait d’une façon plus poétique. Il trouvait des similarités entre les humains et les plantes; ses toiles illustrent leur vie sur le plan émotif, sexuel et mystique. Que le titre l’indique ou non d’une certaine façon, les plantes présentes sur ses toiles ont une personnalité, un comportement ou un état d’âme. Si l’émotion n’est pas transmise par un visage humain ni par un végétal, elle le serait par les lignes et le mouvement de pinceau ou de crayon. Ses tableaux de jardins font partie de ses évocations du règne végétal. Ces œuvres sont composées d’un tapis de carreaux et de rectangles. Les Jardins Tunisiens (parfois aussi appelés les Jardins du sud) sont un souvenir remontant à cinq ans, alors qu’il avait fait un voyage dans le sud. Plusieurs toiles de Klee couvertes de carrés multicolores ont des titres reliés à la flore et, penserait-on, étrangement, à la musique (Harmonie de la flore nordique, par exemple ou Résonance de la flore méridionale). Chaque petit espace représente un lit de fleurs. On peut dire que chaque espace coloré représente un son, une note. Des études élaborées étaient faites par rapport à la correspondance entre les sons et les couleurs, mais ici, le choix doit être purement intuitif. Pour peindre, Paul Klee s’inspirait beaucoup de la musique; en jouer intensifiait son sens des formes. Dans sa vie, la lumière et le son sont très présents et étroitement reliés. Parfois, son rapport avec le monde, apparaît sous forme de symboles, dont certains font penser à des signes musicaux. Tous ses tableaux résonnent, avec l’écho du son qui a formé les plantes, les mammifères, les poissons, les humains et les galaxies infiniment grandes. On ressent que le peintre a capté ces vibrations, et peut-être, les jardins peints, sont en soi une pièce musicale, où chaque couleur est une ligne dirigeante dans la mélodie et peut être adressée séparément.
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Situation dans son contexte | En 1911, Klee fait la connaissance de Kubin, de Jean Arp, des artistes du Cavalier bleu, Kandinsky, Marc, Macke… Plus tard, à Paris, il découvre les galeries d’avant-garde. En 1914, son voyage en Tunisie avec d’autres peintres, va marquer un tournant essentiel dans l’évolution de son art. En 1920, il commence son enseignement à l’école de Bauhaus, où, plus tard, Kandinsky va aussi enseigner. Lorsqu’en 1925 le Bauhaus sera transféré à Dessau, Klee va participer à sa première exposition surréaliste à Paris. Durant sa vie il voyage beaucoup et participe à des nombreuses expositions. En 1931, il quitte le Bauhaus pour l’académie des Beaux-Arts de Dusseldorf. Ce qui marquait beaucoup le peintre, ce n’était pas uniquement des circonstances extérieures, mais des recherches et questionnements intérieurs intenses sur la structure de l’Univers et le fonctionnement de la nature. Les circonstances n’étaient là que pour le pousser à approfondir de plus en plus ces recherches-là.
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Incidences | Klee a laissé après soi une grande richesse artistique, et on pourrait dire même interdisciplinaire, même si ce n’est pas dans le sens propre du mot. Selon lui, l’artiste doit être aussi poète et aussi philosophe. Klee était tout cela, en plus d’être un musicien et un scientifique. Sa passion pour la vie se reflète dans tous les domaines, et sa quête de l’infini peut être vue dans chaque trace qu’il a laissée. Juste en tant que peintre, son approche contient plusieurs disciplines, qui se trouvent souvent fusionnées dans un seul de ses nombreux travaux. On entend presque la musique transmise par la couleur; on perçoit la valeur poétique d’une peinture, qui est intensifiée davantage par un titre ludique, mais révélateur.
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1 VERDI, Richard. Klee and nature, New York, Rizzoli International Publication, 1984, p.78
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Bibliographie | FERRIER, Jean-Louis. Paul Klee,
Paris, Éditions Pierre Terrail, 1998, 208 p.
GROHMANN, Will. Klee, Genève, Ars Mundi, 1991, 127 p. GROHMANN, Will. Paul Klee, Paris, Flammarion, 1929, 107 p. VERDI, Richard. Klee and nature, New York, Rizzoli International Publication, 1984, 258 p.
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Commentaire |
Margarita Fert
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